Vivre ensemble les paraboles

6 octobre 2019

Dans la parabole que nous venons d’entendre Jésus parle d’une graine de moutarde pour parler de la foi. Dans une autre parabole, il est dit que la graine de moutarde - je préfère dire : « la graine de sénevé » - est la plus petite des plantes du jardin. Donc avoir la foi comme une graine de sénevé, c’est avoir une foi toute petite, minuscule. Et pourtant nous ne l’avons pas puisque, même les apôtres ne l’avaient pas ! Dans notre passage, ce sont les apôtres qui ont dit à Jésus : « Augmente en nous la foi ! »

Cependant Jésus prend une image singulièrement suggestive : l’arbre qui se plante dans la mer ! Ce n’est pas seulement très fort, c’est tout à fait paradoxal et même absurde. Quel intérêt cela aurait-il qu’un arbre se plante dans la mer ?! Si c’est un cerisier pour aller cueillir les cerises ce ne sera pas pratique. Et si c’est un platane il faudra faire du pédalo pour profiter de son ombre !

En fait, Jésus tient à souligner que lorsque la foi est forte tout devient possible. Mais, c’est là qu’est, pour nous, la difficulté. Quand j’ai demandé la guérison de Robert, un ami qui est mort d’un cancer, et que je ne l’ai pas obtenue, est-ce que je manquais de foi ? Sans doute ! J’avais le fort désir de sa guérison, un très fort désir, mais je demandais sans y croire vraiment. Je me disais, au fond de moi : « Il n’y aura pas de miracle. » Et c’est là la lacune. Il nous faut croire aux miracles. Et ne pas cesser de prier.

Mais lisons la deuxième partie du texte que nous venons de lire et qui est tout à fait indépendante de la première.

Le serviteur qui a travaillé au champ est un serviteur, qu’il ait labouré ou gardé les bêtes. Et à son retour le maître sera servi par lui et c’est seulement une fois ce nouveau travail accompli, non plus au champ, mais à la maison, qu’il pourra manger et boire. Et le serviteur devra trouver cela normal, dans l’ordre des choses : « Nous sommes de simples serviteurs, nous n’avons fait que notre devoir. »

Cependant, dans l’évangile de Luc, nous avons une autre parabole, qui ressemble et qui est toute contraire. Cette fois, ce n’est pas le serviteur qui rentre des champs, mais le maître qui revient de ses noces. Quand il arrive, tout de suite, les serviteurs ouvrent : ils font leur travail de portiers. Mais, alors, le maître prend la tenue de service, les fait assoir à table et les sert. C’est complètement invraisemblable ! Le soir de ses noces un maître s’occupe de la mariée, pas de ses serviteurs. Bien sûr, il peut leur dire : « Descendez à la cuve, prenez une bouteille de champagne et buvez à ma santé ! », mais il ne va pas les servir à table !

En fait, si l’on veut comprendre ces deux paraboles, il ne faut pas les lire séparément. Il faut les lire ensemble. C’est ce que les exégètes appellent « l’intratextualité ».

Dans le temps ordinaire, dans le cours ordinaire de la vie, nous sommes des serviteurs. Nous ne sommes pas exploités ou maltraités et une fois le service achevé nous pourrons nous rassasier. Mais, avec l’évangile, on est dans le temps des noces et ces noces sont celles du maître ! Du coup, nous ne sommes plus de simples serviteurs, mais nous devenons amis du maître. Dans l’évangile de Jean, Jésus ressuscité dit aux disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis ». Et dans le même évangile de Jean, Jean Baptiste se présente comme l’ami de l’époux et dit que sa joie est parfaite.

Frères et sœurs, soyons amis de Jésus. Il a célébré ses noces et nous sommes invités. A l’eucharistie, nous partageons sa table, nous sommes convives de Dieu ! Comment notre joie, à l’instar de celle de Jean-Baptiste, ne serait-elle pas parfaite ?

Mais, frères et sœurs, que fait donc un ami à son ami ? Il lui rend service ! L’ami est l’authentique serviteur. Mais un serviteur qui, du coup, ne mesurera pas sa peine, qui ne réclamera ni temps de repos ni salaire. Il sera totalement dévoué à son ami. Soyons cela des amis qui partagent la joie du maître et des serviteurs qui travaillent à sa vigne !