Homélie du Père Doumas

1er octobre 2020

Homélie du 27 septembre 2020

A nouveau nous avons, dans l’évangile, une parabole. J’y reviendrai, mais, auparavant je voudrais vous raconter une parabole de mon invention. Je l’ai fait plusieurs fois ces derniers temps. Celle-ci est une de mes préférées.

C’est l’histoire d’un éléphant, d’un bel éléphant, grand comme tous les éléphants et avec tout ce qu’ont les éléphants : une trompe, de grandes oreilles et une petite queue. Mais, cet éléphant a un problème, encore plus grand que sa trompe : il est amoureux. Pas d’un autre éléphant, ce serait trop facile ! Mais d’une petite souris.

Bien sûr cette petite souris est une très jolie petite souris, toute grise, vraiment mignonne. Mais, voilà, comme toutes les petites souris, elle court sans cesse, dans tous les sens ; elle est un peu fofolle. C’est ainsi que l’éléphant se trouve devant un problème très difficile : comment déclarer son amour à la petite souris ? Car, bien sûr, quand il se déplace vers elle, lourd comme il est, elle s’enfuit tout de suite. C’est insoluble, mais il réfléchit et finalement il trouve la solution. Il se couche de côté et Il s’efforce de faire le moins de mouvements possibles et il attend que la souris s’approche. Mais, quand elle s’approche et qu’il commence à lui parler, à peine a-t-il bougé, même très peu, la voilà qu’elle repart en courant. En fait, l’éléphant n’a qu’une seule solution pour dire son amour à la petite souris : rester totalement immobile, sans aucun mouvement - sinon celui du battement de son cœur ! Alors, la petite souris n’a plus peur, elle peut s’approcher, entendre et comprendre de quel amour elle est aimée.

Vous avez compris ! L’éléphant, c’est Dieu, la petite souris, nous les hommes.

 

 

Bien sûr, Dieu est bien plus grand qu’un éléphant, même comparé à une souris ! Et, à l’inverse, l’humanité est bien plus folle qu’une souris. Et c’est cela qui oblige Dieu à agir très discrètement avec les hommes.

Souvent les hommes s’en plaignent. Ils reprochent à Dieu de se cacher, de ne pas se manifester. Pourtant, Dieu a pris les grands moyens : la création, l’incarnation, la rédemption, la résurrection … Mais, de fait, dans tout cela, il agit avec beaucoup de discrétion. A l’Horeb, le prophète Elie en a fait l’expérience : Dieu n’est ni dans le tremblement de terre, ni dans l’orage, à peine se manifeste-t-il par une brise légère.

Frères et sœurs, si Dieu se mettait à bouger à sa mesure à lui, le monde s’écroulerait ! C’est ce qui se passera à la fin des temps. Aujourd’hui, il demeure immobile, ou presque. Il laisse seulement battre son cœur pour dire son amour aux hommes.

Nous avons à faire comme saint Jean, qui à la Cène se penche sur le cœur de Jésus et entend son amour. Cela ne se fait pas dans le tumulte et il n’y a là rien de spectaculaire. Tout est discrétion et intimité. Ne réclamons pas au Seigneur les fureurs du Sinaï, ni même les langues de feu de Pentecôte. Mais, approchons-nous de son cœur, mettons-nous à l’écoute de son amour.

Cela exige de nous le silence intérieur et, aussi, la durée de la prière. On ne rencontre pas le Seigneur dans l’agitation extérieure ou en coup de vent. On rencontre le Seigneur dans le rythme lent et profond de l’oraison. C’est là qu’il parle, c’est ainsi qu’il parle.

Cela peut se passer chez vous, dans la pièce de votre choix, en faisant une pause ou en continuant à faire le ménage. Ou bien dans la rue ou dans votre voiture. Ou en passant à l’église. En fermant les yeux ou en ouvrant un livre ou une revue. Bien mieux encore en lisant l’évangile ! Mais écoutez le battement du cœur de Dieu. Ecoutez le battement du cœur de Dieu ! Prenez le temps. Car, le battement du cœur de Dieu est permanent, bien rythmé, sans confusion, doux et profond ; il donne la paix, il fait pénétrer en nos coeurs la joie discrète du secret d’amour. Il est la musique qu’écoutent les saints. Il fait exulter de joie la Vierge Marie.

Je termine par une confidence : j’ai eu du mal cet été pour faire oraison. Quand c’est comme cela, je me réfugie dans le chapelet. Pour moi, c’est un peu l’oraison du pauvre. En fait, la richesse des paroles et l’aide maternelle de Marie viennent au secours de ma faiblesse et me donnent de réentendre le coeur battant de Dieu !

Je conclus avec un mot sur la parabole des deux fils, l’un qui dit oui et qui fait non et l’autre qui dit non et qui fait oui. Dans le contexte évangélique, c’est une rude critique des pharisiens, nous, chrétiens d’aujourd’hui, prenons-la pour un appel à surmonter nos premiers mouvements, souvent négatifs, et à entrer, de fait, dans la prière, dans l’intimité avec le Seigneur. Amen.