Serons-nous un jour des saints ?

2 novembre 2018

Quand nous fêtons Toussaint, nous fêtons tous les saints. Tous les saints, ça fait, sans doute, beaucoup de saints. Et c’est tout à fait réjouissant  ! Mais, ce pourrait être décourageant, si, un jour du moins, nous ne devions pas en faire partie. C’est ainsi que je vous pose, très directement, la question : serons-nous, un jour, des saints  ?

Il y a peu de chances - je manque peut-être de foi en disant cela  ! il y a peu de chances que l’un d’entre nous soit, un jour, un saint canonisé par l’Eglise. Je suis convaincu qu’il y a des saints parmi nous : mais, franchement, je ne vois pas, parmi nous, de paroissien, ou de paroissienne, qui aurait le profil d’une telle célébrité. Et encore moins le curé. Cela est évident  ! Pourtant, canonisables ou non, tous, nous devons devenir des saints. Pas des «  petits saints  », mais de vrais saints. En fait des saints humbles, cachés, des saints du quotidien.

Que faut-il faire pour être un saint  ? Rien  ! Rien, cela ne veut pas dire rien du tout, parce que d’une certaine manière, il faut faire beaucoup. Mais, cela veut dire que ce n’est pas en faisant ceci et cela, et encore cela et ceci, et encore et encore, qu’on devient un saint. On devient un saint parce que l’on accueille dans sa vie le Seigneur - lui le seul Saint. Plus exactement, parce qu’on accueille sa propre vie comme un don du Seigneur. Cela est vraiment décisif. Et c’est ce sur quoi je vais insister - ce sera mon «  message de Toussaint  ».

Ma vie est à l’initiative d’un autre - de Dieu  ! Et cette initiative se réalise dans un don. Et, certes, si ma vie est un don, elle m’appartient : elle est ma vie. Mais avant que je l’ai reçue, elle a été voulue, désirée. Et celui qui l’a voulue me la donne. Elle est mienne, puisqu’il me la donne, mais s’il me la donne, ce n’est pas pour n’importe quoi : il me la donne comme une vocation.

En fait, il n’est pas facile d’accueillir sa vie comme un don de Dieu et de faire de sa vie une réponse à une vocation. En effet, chacun de nous est habité par le démon de la réalisation de soi et de la satisfaction de ses désirs. Pour accueillir ma vie comme un don de Dieu, je vais devoir purifier mon cœur, mettre à la marge, un à un, l’un après l’autre, chacun de mes égoïsmes, chacun de mes mensonges, chacune des petites glorioles dont je suis si fier. Plus encore, pour accueillir ma vie comme un don de Dieu, je vais avoir à accueillir l’autre comme un frère - car, lui, aussi est don de Dieu  !

Ce n’est déjà pas très facile de s’accueillir soi-même. Mais, cela devient difficile d’accueillir l’autre.

Vous avez remarqué que je dis «  accueillir  ». «  Accueillir  », et non pas «  accepter  »  ! Il ne s’agit pas de se résigner ou de subir. Il s’agit de s’accueillir comme un don de Dieu et d’accueillir l’autre comme un don de Dieu. Vous allez me dire : «  Il y a des dons de Dieu, qui ne sont pas des cadeaux  !  » Et je vous réponds : «  Certes, il n’est pas toujours facile d’accueillir, Non seulement je ne le nie pas, mais je l’affirme. Mais un don de Dieu, c’est toujours un don de Dieu  !

La plus sainte des saints, la Vierge Marie, a vécu cela en grande sœur pour nous, en modèle à imiter. Son «  oui  » à Dieu, son «  fiat  », pour employer le mot latin, n’est pas une acceptation, une résignation. Quand elle dit à l’ange : «  Je suis la Servante du Seigneur  ; que tout se passe pour moi comme tu l’as dit  », c’est un cri de joie, une parole de jubilation. Qu’elle déploie dans son Magnificat : «  Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur  ; il s’est penché sur son humble servante  !  »

Frères et sœurs, il n’est pas facile de devenir des saints. Mais, c’est notre vocation, à tous  ! Et cette vocation ne doit pas être entendue comme une malédiction, mais comme une bénédiction, comme une béatitude  ! Oui, «  Heureux les pauvres de coeur, le Royaume des cieux est à eux  !  » Oui, heureux ceux qui dégagent leur coeur de tous les refus d’accueillir leur propre vie et la vie de leurs frères, car, déjà, le Seigneur les accueille dans son Royaume  ; ils sont saints parmi nous, qui avons à devenir des saints  !