Interprétation d’une parole difficile de Jésus : « Je ne suis pas venu apporter la paix ».

18 août 2019

Nous venons d’entendre un texte difficile, qui donne du fil à retordre à qui le commente. Ou plutôt du fil à détordre ! Car, il faut le dire, c’est un peu tordu.

Jésus dit qu’il est venu apporter un feu sur la terre et qu’il aimerait qu’il soit déjà allumé. Mais quel est ce feu ? Il dit aussi qu’il doit recevoir un baptême et il est dans l’angoisse, une très grande angoisse, avant qu’il ne soit accompli. Mais quel est ce baptême ? Et quel lien entre ce feu et ce baptême ?

On pourrait imaginer que le feu soit « le feu du ciel », qui tombe sur les impies et les anéantit. Mais, quand Jésus dit le sens ultime de sa mission, il s’exprime tout autrement. Il dit qu’il est venu pour annoncer le Royaume de Dieu. On pourrait donc, plus justement, parler du Saint-Esprit. A Pentecôte, ce sont des langues de feu qui brulent au-dessus de la tête des apôtres. Mais, il me semble que ce feu est l’évangile lui-même. Car, l’évangile est un feu - à l’image du buisson ardent. Il brûle sans détruire.

Quant au « baptême », qui provoque l’angoisse de Jésus on ne peut douter qu’il s’agisse de sa Passion. Par le baptême, on est plongé, de tout son corps, dans l’eau, Jésus sera plongé de tout son être dans la mort. Et ainsi, on comprend le lien entre le feu, qu’est l’évangile, et le baptême, qu’est la Passion. La proclamation de l’évangile a conduit Jésus à la mort et sa mort est proclamation de la Bonne nouvelle du salut.

Mais reprenant le propos initial, Jésus pose la question : « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? » Et il répond : « Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. » Jésus serait-il un partisan du djihad ? Veut-il la guerre ? Et nous faudrait-il dire : « Non, l’évangile n’est pas un message de paix, mais de guerre » ? En fait Jésus - ce n’est pas rare dans l’évangile – utilise ici la provocation et manipule le paradoxe. Mais, sous la provocation, il faut discerner l’intention et comprendre le message.

Franchement, pour que belle-mère et belle-fille se disputent, elles n’ont pas besoin de Jésus. Elles y arrivent très bien toutes seules. Et, malheureusement, nous le vivons souvent douloureusement, les familles sont divisées et Jésus n’y est pour rien ! Alors quel est le sens ? En quel sens faut-il prendre ce terme de « division » ?

Jésus veut dire que les hommes prendront des positions contradictoires à son sujet. En Israël, les uns le reconnaîtront comme le messie, d’autres le condamneront comme faux messie. Et cela provoquera des divisions. Mais Jésus ne dit pas seulement cela. Ce serait une très plate banalité. Car, qui ne divise au moment même où il rassemble ? Que je sache le président de la République ne fait pas l’unanimité, certains votent pour lui, mais beaucoup votent contre lui. Et il se peut que belles-mères et belles-filles se disputent à son sujet !

En fait, la « division » qu’apporte Jésus est au centre de notre cœur. Adhérer à Jésus ou ne pas adhérer à Jésus est l’objet d’un combat.

Sans doute, dans nos vies de croyants avons-nous des moments paisibles. C’est très sereinement alors que je donne ma confiance à Jésus. La foi est ainsi comme une évidence tranquille. Il est l’éléphant dans le couloir. Impossible de passer à droite ou à gauche. Il est là : devant et, pour ainsi dire, j’y tape dedans. Mais, le doute, fait partie de l’expérience de foi ? La vie du croyant n’est pas un long fleuve tranquille. Il y a des passages étroits et des ruptures brutales. Toutes n’ont pas l’ampleur des chutes du Niagara, mais parfois elles sont vraiment abruptes. Cependant, je crois qu’en fait ce qui menace notre foi c’est la longue usure du quotidien, le rabot de l’habitude. Et c’est là que la paix est dangereuse, qu’elle peut conduire à l’assoupissement. C’est là que le feu s’éteint !

Frères et sœurs, il nous faut des temps forts ! Des moments où à nouveau, à neuf, nous choisissons le Christ. Des moments où nous ressaisissons nos vies et les réengageons en faveur du Christ. Peut-être ce moment de vacances, parce qu’il est différent du reste de l’année, est-il un moment favorable ? En tout cas, soyez-en sûrs, à la rentrée, je vous ré-interpellerai - non sans vigueur ! Amen.