Homélie du Père Doumas

25 juin 2021

Il est arrivé à Jésus d’être submergé par l’angoisse. C’est le récit de Gethsémani, si humain et si bouleversant. Mais, Jésus n’est pas un angoissé. J’imagine son visage : serein, souriant, détendu. De lui devaient émaner, au quotidien des jours, force et tranquillité.

Sans doute on le voit saisi par la colère : au Temple avec les marchands ou face à l’hypocrisie des pharisiens. Et quand il prêche, il le fait avec passion. Les béatitudes ne sont pas énoncées sur un ton neutre et quelconque. C’est une proclamation !

Mais, Jésus aimait raconter. Il le faisait alors tranquillement, en prenant son temps. Sans doute calculait-il son coup ! Combien de paraboles sont fondées sur un paradoxe ou une inversion de sens ! Mais, même s’il cherchait à étonner, il le faisait posément et, surtout, il s’adressait aux hommes en touchant leurs cœurs.

Il a un art extraordinaire, qui n’est qu’à lui, pour rencontrer celui qui vient vers lui ou qu’il croise. On pense à Zachée, à l’entrée de Jéricho, ou à l’aveugle Bartimée, à la sortie de Jéricho. On pense, bien sûr, à la samaritaine ou à la femme adultère. Et à tant d’autres !

Mais, nous venons de lire un passage très singulier, que l’on intitule « la tempête apaisée ». Jésus, de fait, calme la tempête et rassure les disciples. Mais, d’abord, il dort. L’évangéliste précise : « sur le coussin ».

J’aime beaucoup cette scène : Jésus, qui dort sur le coussin. Dans la barque ! A l’arrière de la barque. On peut penser bien sûr que Jésus est exténué, qu’il dort parce qu’il est extrêmement fatigué. Qu’il est littéralement tombé de sommeil. Mais, on peut penser l’inverse. Que Jésus fait, tout bonnement, sa sieste ! Cette tranquillité de Jésus sur le coussin est le meilleur contraste avec la tempête, mais aussi avec l’angoisse des disciples. Ils paniquent et lui il fait sa sieste !

Notez bien : ce n’est pas le fracas de la mer ou le chahut des vagues qui le réveillent, mais les disciples. L’évangile dit : « Les disciples le réveillent et lui disent : Maître, nous sommes perdus. Cela ne te fait rien ? Eh bien, non ! Cela ne fait rien à Jésus ! Certes, il va calmer la tempête. Il le fait, pour ainsi dire, par acquis de conscience. Il lui faut bien rassurer les disciples, mais, lui, il n’a qu’une envie : retrouver le coussin à l’arrière de la barque ! Les disciples ont malencontreusement interrompu sa sieste !

Dans l’évangile les disciples s’émerveillent de la puissance de Jésus. Ils sont saisis d’une grande crainte. Ils se disent entre eux - c’est-à-dire dans le dos de Jésus : « Qui est-il donc ? » Ils se demandent qui il est puisque même le vent et la mer lui obéissent. En fait, cela revient à se demander : « Est-il Dieu ? »

Mais, si, nécessairement, nous sommes, nous aussi, impressionnés, par l’autorité de Jésus, il convient de s’étonner, aussi, de son calme et de sa tranquillité. Assurément dans nos vies le Seigneur peut agir avec autorité et calmer nos tempêtes intérieures, mais, bien plus souvent, il dort sur le coussin, à l’arrière de notre barque ! Et, en fait, il n’est pas, alors, inactif ou absent. Sa présence est décisive. C’est elle, en fait, qui nous met en, sécurité et nous permet de faire la traversée.

Frères et sœurs, soyons nous-mêmes paisibles et tranquilles, que les tempêtes ne nous empêchent pas de dormir ! Soyons sereins et confiants. Le Seigneur est monté dans notre barque ou, à l’inverse, nous sommes montés dans la barque du Seigneur. Mais la chose est certaine : il est avec nous, nous sommes en sa compagnie et nous traverserons d’une rive à l’autre ! Avec lui, grâce à lui ! Amen.