Homélie du 26 juillet 2020

29 juillet 2020

Cette double parabole du trésor et de la perle, je la propose aux fiancés comme évangile et souvent ils la prennent. Le commentaire est très facile : le trésor, c’est Hubert, la perle Hélène. Quand Hubert a connu Hélène, il n’était pas question que ce soit une autre et quand Hélène a connu Hubert, il n’était pas question que ce soit un autre. Je précise simplement que je n’ai pas célébré leur mariage, mais leur cinquante ans de mariage …

Dans nos vies, il y a des choix décisifs. C’est le sens de la parabole. Elle s’applique aux couples, mais elle concerne avant tout l’évangile et la foi.

Quand on choisit l’évangile, tout le reste tombe et rien n’a véritablement d’importance. Chacun de nous intériorise cela. J’ai choisi Jésus et pas Mahomet ou Bouddha. C’est décisif et structurant pour toute la vie.

Ma première année d’étude universitaire à Montpellier s’est terminée sur Mai 68. Le marxisme était alors dominant. Les amphis de la faculté s’appelaient Marx et Lénine. Dieu merci, il n’y avait pas d’amphi Staline ! Pour un jeune chrétien : je n’avais pas 20 ans, ce fut une épreuve pour la foi.

Le concile venait à peine de se terminer et n’avait pas encore porté beaucoup de fruits. On était, en fait, en pleine période de contestation. Beaucoup de prêtres ont alors quitté le ministère et les séminaires se sont vidés à vue d’œil. J’avais comme seul soutien l’aumônerie étudiante, qui proposait bien peu de choses et sans véritable solidité. Ma foi a tenu grâce à l’éducation de mes parents et, aussi à l’expérience, très positive, du petit séminaire d’Avignon. J’ajoute que la sœur ainée de mon père était carmélite et a beaucoup prié pour moi.

Je reviens à la parabole avec une autre parabole !

Montpellier n’est pas loin de Palavas et en ce beau mois de mai nous faisions grève et nous allions à la plage. Et je me revois encore, face à la mer et très pensif sur l’avenir. A vingt ans, c’est une question redoutable ! Je jouais avec le sable. Je prenais du sable dans la main et lentement je le laissais s’écouler jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus. Alors, je recommençais. Ce geste accompagnait ma méditation et l’inspirait.

Je me disais que ma foi, celle que j’avais reçue et qui avait été très vivante en moi, s’écoulait de ma vie comme le sable de ma main. Peu à peu, la foi sortait de mon cœur et s’appauvrissait très gravement. J’étais sur le chemin de l’athéisme. Je n’allais pas devenir marxiste, pas de danger de ce côté-là, mais bientôt je ne serai plus chrétien. C’est alors que dans un réflexe venu du profond de moi, et sans doute inspiré par l’Esprit Saint, je serrais les doigts, empêchais le sable de couler et décidais de garder la foi, de rester chrétien.

Une chose m’était clairement apparue. Rien ne pouvait remplacer la foi et, donc, perdre la foi était une perte sèche, sans aucun profit et avec beaucoup de choses stériles. A cette époque-là je ne pensais pas du tout à être prêtre. Il y avait dans notre cours une certaine Catherine qui me plaisait bien et la perspective d’enseigner la philosophie m’intéressait beaucoup. Mon réflexe a été un réflexe de croyant.

Une telle réaction est très simple en elle-même, mais elle s’alimente à beaucoup de sources. Je ne vais pas toutes les énumérer. J’en relève seulement deux. Au petit séminaire, j’avais vécu une vraie vie de prière - ce fut déterminant ! Et par ailleurs j’avais une adhésion très personnelle à Jésus.

Dans les discussions que je pouvais avoir avec mes collègues communistes, c’était déterminant. Jésus n’était pas éliminable de ma vie. Il était le trésor trouvé dans le champ, la perle de grand prix. Rien ne pouvait le remplacer, se substituer à lui.

Parmi vous, beaucoup de parents et beaucoup de grands parents souffrent de la distance que leurs enfants et petits-enfants ont pris avec la foi et la pratique chrétienne. Souvent tout n’a pas été éliminé et beaucoup n’hésiteraient pas à se dire chrétiens, mais la plupart du temps, du coup, ils ne pas prêts à transmettre ce qu’ils ont reçu, et dont pourtant ils vivent.

Je sais bien, le dialogue sur ce sujet n’est pas toujours facile, mais la parabole du trésor et de la perle peut y aider. Dans les échanges, qui, généralement s’improvisent, il est bon de souligner que dans nos vies il y a des choses décisives, qu’on peut négliger un temps, mais qui, parce qu’elles sont décisives, doivent rester vivantes et produire de la vie.

Je crois qu’on peut tranquillement répéter que Jésus ne se remplace pas, qu’il n’a pas d’équivalent. Et que négliger son enseignement et sa vie, et aussi sa mort et sa résurrection, ne peut rien produire de bon et, en tout cas, prive de grands biens. Encore faut-il, bien sûr, que ces « grands biens » soient manifestes dans nos propres vies. C’est ce qu’on appelle le « témoignage ». Amen !