Homélie

17 novembre 2019

Ce texte, que nous venons de lire, est très composé.

On commence par une considération sur le Temple. Il est grand et beau, il est magnifique ! Et pourtant il sera détruit. Cela interviendra à la fin de la guerre entre Juifs et Romains, qui commence en 66 et se termine en 70 par l’incendie du Temple. Il restera des pierres sur des pierres. Ce qu’on appelle le « mur des lamentations », mais jamais le Temple ne sera reconstruit. A la différence du Temple de Salomon, reconstruit à la fin de l’Exil, au VIe siècle.

Cette destruction a été un événement considérable parce qu’à partir de cette date les grands- prêtres, qui contrôlaient le Temple, ne sont plus les chefs de la nation juive, mais le pouvoir passe aux pharisiens, qui vont fonder le judaïsme rabbinique, qui dure encore.

Dans la suite immédiate du texte de Luc, on passe à tout autre chose : au temps de la « fin ». L’époque de Jésus est marquée par les courants apocalyptiques, qui annoncent la fin de toutes choses. Jésus met fermement en garde : « Quand vous entendrez parle de guerres et de désordres, ne soyez pas terrifiés. Il faut que cela arrive d’abord, mais ce ne sera pas aussitôt la fin. » Cependant, Luc, plutôt de Jésus, reprend des phrases tirées des apocalypses en vogue : « Il y aura de grands tremblements de terre et en divers lieux des famines et des épidémies des phénomènes effrayants surviendront et de grands signes venus du ciel ». Mais, manifestement, c’est la suite qui importe : l’annonce des persécutions.

« On vous livrera aux synagogues et aux prisons, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs. » Et là Jésus donne un conseil de grande portée : « Vous n’aurez pas à vous préoccuper de votre défense. C’est moi qui vous donnerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer. » Il y a là un trait majeur des martyrs chrétiens. Ils ne sont pas simplement des témoins entêtés. Ils parlent les paroles de Jésus et leur parole est une sagesse, qui confond les accusateurs.

Les chrétiens seront livrés, même par leurs proches et il y aura des exécutions. Cependant la persévérance dans la foi sera décisive : « vous garderez votre vie ! » Ce tableau est impressionnant et, de fait, le christianisme est né dans la persécution et se développera jusqu’au IVe siècle dans la persécution. Elle ne sera pas constante et permanente. Mais, à cette époque, pour un motif futile, elle pouvait se déchaîner et être très meurtrière. Cependant, le grand siècle de la persécution n’a été ni le second, ni le troisième siècle, au temps de l’Empire romain, mais le vingtième siècle. Il y a eu Staline et les nazis et tant et tant d’oppresseurs de la liberté religieuse et des chrétiens, catholiques, orthodoxes ou protestants ont été massacrés en masse. La haine du christianisme a été un phénomène massif !

Aujourd’hui en France on ne peut pas parler de persécution. Cependant, il y a d’importants courants d’opinion qui font du christianisme l’ennemi à abattre. Chez certains il y a la volonté, farouche, de ruiner jusque dans ses racines la tradition chrétienne. Quelle attitude adopter par rapport à cela ?

D’abord évitons la paranoïa ! Ne voyons pas partout de l’antichristianisme. Le mariage homosexuel ou la PMA pour toutes les femmes sont, sans doute, portés par des idéologies hostiles, mais il s’agit là, principalement, de mouvements qui parcourent en profondeur le champ social, certes en décalage total avec le christianisme, mais qui ne sont pas alimentés par l’antichristianisme comme tel. Il n’est pas nécessaire d’être antichrétien pour avoir des idées complètement opposées au christianisme ! Et, pour moi, là est la réponse : développer de manière cohérence et crédible la conception chrétienne de la vie et de la vie en société. La balle est dans notre camp ! Et, de fait, Jésus, dans le passage de l’évangile que nous venons de lire, parle de « sagesse ». Ayons cette sagesse, et d’abord la tranquillité de cœur et d’esprit, la confiance, pour affronter les courants contraires d’aujourd’hui. C’est la nôtre « persévérance ». Amen !