« Le Saint Esprit est-il paresseux ? »

2 mars 2019

"Une poutre dans un œil, cela n’a pas de sens ! Et déjà une paille. Si vous avez une paille dans l’œil, votre œil est sans doute perdu. L’ophtalmo ne pourra pas grand-chose pour vous ! On va, donc, dire que Jésus exagère. Cependant, cette exagération, qui fait image, n’est pas gratuite. Elle a un but précis et éloquent.

En effet, au-delà de cette image de l’œil, il y a la disproportion entre la paille et la poutre. La poutre, c’est énorme par rapport à la paille. On dit d’ailleurs « fétu de paille ». Et donc Jésus nous dit que nos défauts sont bien plus grands, beaucoup plus grands, que ceux que nous remarquons chez les autres.

A vrai dire, dans la réalité, il se pourrait bien que les défauts de l’autre soient bien plus importants que les miens. Ceux d’Hubert, par exemple. Mais, mon exemple n’est pas bon : Hubert n’a pas de défaut alors que j’en ai plein. Mais, bon ! pour vous, il doit vous arriver de rencontrer des gens qui ont bien plus de défauts que vous. Pour le coup, Liliane est comme ça !

Mais, en fait, ce n’est pas le sujet. Jésus ne nous dit pas que nos défauts sont toujours plus grands que ceux des autres. Il nous dit qu’en scrutant les défauts des autres nous devenons incapables de connaître les nôtres ! En d’autres termes, ce qui m’empêche de voir mes défauts, c’est lorsque je ne vois que des défauts chez les autres. Le jugement prononcé sur autrui m’empêche de me juger moi-même à la juste mesure.

Frères et sœurs, il est important de se juger ! Il est important de savoir ce qui est bien et ce qui est mal dans nos vies. Si nous n’avons pas une juste évaluation de nous-mêmes, de ce que nous sommes, qualités et défauts, et, aussi, de ce que nous disons et faisons en bien ou en mal, nous ne saurons pas nous corriger.

Prenons donc le conseil de Jésus, évaluons-nous, mais sans nous comparer. Prenons pour mesure l’évangile ! Mais il y a, aussi, les sept péchés capitaux. C’est délicieux, les péchés « capitaux ». Et c’est très utile.

Les péchés capitaux ne sont pas les plus gros péchés, ceux qui sont au sommet du hit-parade. Les péchés capitaux sont les péchés sources, ceux dont tous les autres dérivent. Par exemple, l’orgueil est la source du mépris. C’est parce que je suis orgueilleux que je méprise les autres. Ou bien l’égoïsme est la source de l’avarice.

Ainsi la liste des sept péchés permet un décryptage complet. Mais, je ne vais pas le faire dans cette homélie. Ce serait trop long et faire une trop longue homélie c’est un péché !

Petite parenthèse. Un Père de l’Eglise disait à l’un de ses disciples : « Tu soignes l’introduction de l’homélie, tu soignes la conclusion de l’homélie et tu fais en sorte qu’elles ne soient pas trop éloignées l’une de l’autre ! »

Donc, pour ne pas être long, je choisis un seul péché capital, un seul péché source. C’est un de mes péchés mignons, un de ces péchés que j’aime caresser ! C’est la paresse. Sans tomber dans un cléricalisme primaire, on peut d’ailleurs dire que la paresse, surtout la paresse intellectuelle, est un défaut très répandu dans le clergé.

Pour bien comprendre la gravité de la paresse, il faut prendre en considération deux choses. La première nous vient de Descartes, qui disait que l’inertie est la force la plus puissante de la nature. De fait, c’est fou combien nous nous soumettons à l’inertie ! Ne pas soulever le petit doigt est une pratique universelle, mais qui pour chacun de nous prend un caractère particulier, et qui, dans certaines circonstances, devient vraiment grave. Il faut noter que chez des personnes sur-actives, et même agitées, la paresse peut être le défaut majeur. On fait beaucoup, mais toujours la même chose ! Le grand signe de la paresse, c’est la répétition !

Mais pour évaluer la gravité de la paresse, il faut se dire une deuxième chose, qui est tellement évidente qu’on ne la formule quasiment jamais : il est impossible d’imaginer le Saint-Esprit paresseux. Ni le Père, ni le Fils ne sont paresseux, mais alors le Saint Esprit, le petit dernier de la Trinité, encore moins !

Il y a une conclusion à ces deux considérations. Si vous voulez lutter contre la paresse qui est en vous, asseyez-vous et ne faites plus rien, plus rien du tout. Vous êtes assis, bien assis ! Les fesses bien à plat et le dos bien droit. Vous apaisez votre souffle et vous fermez les yeux et vous laissez le silence l’emporter sur le bruit - peut-être faudra-t-il un peu de temps pour y arriver. Et puis, dans cette position de repos, extérieur et intérieur, vous laissez travailler l’Esprit Saint.

Frères et sœurs, la paresse, c’est quand on ne laisse pas travailler l’Esprit Saint dans son cœur ! Amen".