Marie en son assomption

18 août 2019

Aux premiers siècles de l’Eglise, la grande figure de la sainteté était le martyr : on pense à Perpétue, à Blandine, à Polycarpe … Mais Marie n’a pas été martyre. Et, donc, c’est avec la fin des persécutions que Marie prend sa place dans la vie des chrétiens. En fait, il a fallu les querelles, au V° siècle, sur l’unité de la divinité et de l’humanité dans le Christ pour que la théologie et, bientôt le culte, se développent vraiment autour de Marie.

Paradoxalement, tout a commencé par la contestation du « titre » de Marie, « Mère de Dieu ».

Nestorius, un patriarche de Constantinople, peu inspiré, rigide dans sa théologie, se mit à dire qu’on ne pouvait pas appeler Marie, « Théotokos », « Mère de Dieu », que le « titre » juste était « Christotokos », « Mère du Christ ». Nestorius n’était pas un ennemi de Marie. Simplement, il estimait que Marie avait engendré, non pas la divinité, mais Celui qui unit la divinité et l’humanité, le Christ. En réalité, Nestorius ne comprenait pas que l’union de Dieu et de l’homme dans le Christ est si forte, si profonde et si originelle que l’on peut dire, et qu’il faut dire, qu’en engendrant Jésus Marie a engendré, non pas seulement l’homme Jésus, ou le composé Dieu-homme, le Christ, mais qu’elle a engendré Dieu, et donc qu’elle est « Mère de Dieu ».

Ce que je viens de dire est, sans doute, un peu abstrait, mais cela ne doit pas rester lointain pour vous. Car nous sommes au cœur de la foi chrétienne.

En effet, qu’est ce que la foi chrétienne ? La foi chrétienne, c’est dire que Dieu n’est pas resté dans son ciel, se contentant d’envoyer aux hommes des prophètes, ou un Prophète, la foi chrétienne, c’est dire que Dieu s’est compromis jusqu’à l’extrême pour être proche de l’homme. Le christianisme, c’est la folie de Dieu qui surmonte la différence entre Dieu, Unique, Tout-Puissant, Créateur, et ses créatures, faibles, mortelles, infimes. Et cette folie va au point que Dieu se fait homme dans l’incarnation, que Dieu meurt sur la croix, que Dieu se fait nourriture dans l’eucharistie.

Pour le judaïsme et pour l’islam, tout cela est insupportable, impie, blasphématoire. Pour un juif ou un musulman, que Dieu ait un Fils est une absurdité, qu’il ait une Mère est le comble de l’absurdité.

Pour nous chrétiens, Marie est le gage de la pleine humanité du Fils de Dieu incarné. Il a été conçu ex Maria uirgine. Ex, en latin, veut dire « tiré de », « extrait de ». Jésus est tiré de Marie, extrait de Marie. On dit dans le Je vous salue Marie : « le fruit de vos entrailles » ! C’est concret, les « entrailles » ! Mais, gage de l’humanité de Jésus, Marie est aussi le gage de l’union plénière de Dieu et de l’homme en Jésus. Si cette union n’était pas plénière, n’était pas radicale, l’incarnation ne serait qu’à moitié ; en fait, elle échouerait. Et nous ne serions pas sauvés ! Mais, à l’inverse, si cette union de Dieu et de l’homme en Jésus est plénière et radicale, alors, Marie n’est pas seulement mère de l’homme, ou mère du Christ ; en engendrant Celui qui est pleinement Dieu et pleinement homme, Celui en qui l’union de Dieu et de l’homme est parfaite, Marie est « Mère de Dieu ».

Une fois acquise cette certitude, au début du V° siècle, les chrétiens n’ont pas cessé, au long des siècles, et jusqu’à nous, de méditer sur Marie. On a fait de la théologie. C’est utile la théologie, car à quoi ça sert de dire « je crois » si on ne sait pas en quoi on croit ? Mais, il n’y a pas eu que la théologie ! Il y a eu mille et mille « pratiques » de dévotion.

Surtout il y a eu la prière. Sous les formes les plus diverses : les hymnes savantes et l’humble chapelet. Et c’est ainsi, dans un va-et-vient permanent entre l’intelligence et le cœur, entre la réflexion et la prière, entre les théologiens et le peuple chrétien, c’est ainsi que l’on a compris que Marie, « Mère de Dieu », est entrée, par delà sa mort, dans la Gloire de son Fils - c’est ce que nous appelons l’Assomption.

Quelle signification cela a-t-il pour nous ? Si Marie est le gage de la vérité de l’incarnation, puisqu’elle est Mère de Dieu, elle est, aussi, le gage de notre avenir : en Marie, en son Assomption, resplendit ce que nous serons. Dès lors, on peut dire qu’elle est notre grande sœur, « la première en chemin », celle qui précède et préfigure l’humanité sauvée.

Frères et sœurs, chantons Marie ! Louons Marie ! Avec elle, exultons ! Elle est la Très-Sainte, qui nous montre en son Assomption l’humanité libérée du mal, l’humanité pleinement acco