« La vie ça monte »

2 décembre 2018

Homélie du Premier Dimanche de l’Avent

En ce premier dimanche de l’Avent, je voudrais vous dire, très simplement, comment je comprends ma propre existence.

Au fil du temps, je la sens plus fragile, plus vulnérable. Ce n’est pas que je perçois une menace. Non  ! Simplement, je sais aujourd’hui mieux qu’hier que la vie a une durée, que cette durée a de la durée : la vie n’est pas si courte que cela, mais cette durée qui dure est, aussi, une durée qui passe, et qui ne cesse pas de passer.

Je n’ai pas peur de la mort. Mais, je n’ai plus cette sécurité, ou cette illusion de sécurité, que donne la jeunesse. Spontanément, avant d’agir, je prends plus la mesure de l’effort que j’ai à faire. Inéluctablement, je suis amené à calculer ce que vont me coûter en temps et en énergie les engagements que je prends.

Je n’en suis pas à la décrépitude, mais au déclin  ! Je ne dis pas que cela me réjouis. Mais, cela ne m’effraie pas. En fait, j’ai le sentiment de découvrir la cohérence de la vie - si l’on peut dire l’arc de la vie : ce qui fait que l’on monte et puis que l’on descend. Et j’essaye de freiner dans la descente  !

Cela vous paraîtra peut-être prétentieux, mais cela me donne de la sagesse. La sagesse, ce n’est pas cette chose un peu tristounette, qui rabote les plaisirs pour combler les peines. La sagesse, c’est cette lumière qui donne de comprendre qu’une vie d’homme n’est pas, en fait, une courbe : on monte, on descend, mais un chemin. Plus exactement, une ascension. Car, frères et sœurs, une vie, ça monte  !

C’est, bien sûr, là que je voulais en venir, ce que je voulais vous dire aujourd’hui - en ce premier dimanche de l’Avent : une vie, ça monte  ! Une vie, ça monte et çà ne cesse pas de monter  ! Mais, bien entendu, parce que ça monte, ça ne prends son sens : la direction de la montée  ! que si nous acceptons l’effort.

C’est ce que maintenant je vais développer, dans la deuxième partie de l’homélie : l’effort.

Ce n’est pas démagogique, l’effort. Ce n’est pas un argument publicitaire. Ce n’est pas, non plus, de tout repos. Et, semble-t-il, ce n’est pas, non plus, festif. Surtout, l’effort demande de faire effort. Si vous comptez sur la spontanéité pour faire effort, ça va rater. Même si vous avez un tempérament très énergique, l’effort véritable va, littéralement, vous coûter. Ainsi, le premier effort de l’effort est de vouloir faire effort.

Il n’y a pas d’effort sans décision de faire effort et rien ne qualifie mieux ma liberté que de décider de faire effort. Mais, je ne fais pas effort pour faire effort. Je fais effort dans un but déterminé. Le sportif va décider de faire l’effort de l’entraînement pour pouvoir gagner le match ou la course. Ainsi, c’est le but qui permet le consentement à l’effort.

Frères et sœurs, au seuil de l’Avent, le but, c’est Noël  ! Mais, quel Noël voulons-nous  ? Celui des païens  ? Celui du Père Noël  ? Celui de la bouffe qui insulte les pauvres  ? Ou bien voulons-nous contempler l’enfant de la crèche, le Fils de Dieu abandonné à l’amour de Marie et à la vindicte d’Hérode  ? Chacun a le choix. Et, en fonction de ce choix, il fera les efforts qui y correspondent  !

Quels sont, donc, les efforts à consentir pour vivre Noël en chrétiens  ? Je ne vous le cache pas : il y en a beaucoup  ! Mais, ils peuvent se résumer à un seul : abandonner toute morgue, toute forfanterie, toute prétention et, aussi, tout ressentiment et tout mensonge, pour être comme cet enfant-là, ce tout petit enfant, posé, déposé sur la terre des hommes, et qui dit comme aucun autre enfant des hommes que tout homme est enfant de Dieu  ! Et parce que, lui, le Créateur est devenu chair, parce qu’en lui la Puissance de Dieu s’est anéantie dans la fragilité du nouveau-né, faisons l’effort, immense et beau, difficile et libérateur, d’être, pour Noël, des hommes et des femmes avec un cœur d’enfant, fragiles dans notre humanité, mais totalement remplis de confiance en Dieu. Amen