« Se convertir : se tourner vers Dieu et vers son frère »

23 mars 2019

A Jérusalem, au temps de Jésus, la tour dite de Siloé s’est effondrée et a écrasé dix-huit personnes. Une catastrophe, comme il s’en produit aujourd’hui encore. On pense aux immeubles insalubres de Marseille, il y a quelques mois. Dans le monde religieux du temps de Jésus beaucoup disent : « C’est à cause de leurs péchés que ces gens sont morts ainsi ». Jésus récuse cette interprétation : ces dix-huit personnes n’étaient pas plus pécheurs que les autres habitants de Jérusalem. Mais, il va plus loin et fait de cet événement tragique, qui a marqué la population, un appel à la conversion.

Il y a les conversions radicales, celles qui retournent complètement la personne, comme Paul à l’entrée de Damas ou, plus récemment, Charles de Foucauld. Et il y a les conversions du quotidien. Je n’ai tué ni père ni mère et je n’ai pas le projet d’envoyer mon conjoint au cimetière, mais il y a mille choses à corriger dans ma vie et je sens bien que s’attaquer à chacune d’elles en les prenant l’une après l’autre sera une tâche impossible. En fait, je sais que c’est plus en profondeur que j’ai à changer, que c’est l’orientation même de mon cœur et de ma vie que j’ai à corriger. C’est cela la « conversion » : la décision de changer son cœur.

La première étape consiste à se tourner vers le Seigneur. Cela n’est pas un simple mouvement du cœur. Cela passe par un comportement très concret, qui s’inscrit dans le quotidien. Ici, je voudrais dire quelques mots sur l’oraison.

« Oraison » vient du latin « oratio », qui désigne la prière en général, mais, « oraison » désigne une prière particulière et qui est primordiale : qui est le fondement de tout le reste.

L’oraison consiste à faire silence et à se mettre dans la présence du Seigneur. Et là dans le silence, c’est-à-dire quand le silence s’est établi en nous, on dit au Seigneur : « Je suis devant toi, Seigneur. Tu es mon Créateur, tu es mon Père et moi je suis ton enfant. Je sais que tu m’aimes et je te dis mon amour ».

L’oraison peut être brève, une ou deux minutes. La bonne mesure, en fait, c’est dix minutes. Mais, bien sûr, quand on est exercé cela peut être plus long et même beaucoup plus long. Mais, dix minutes d’oraison matinale est une très bonne base.

En contrepoint, pour ainsi dire, à l’oraison, il y a la lectio diuina. On lit un texte - de préférence l’évangile du jour - et on relève dans le texte ce qui nous interpelle particulièrement. On en approfondit le sens et on éclaire sa vie - concrètement sa journée - par le texte. Cela prend quelques minutes. Et, donc associées l’une à l’autre la lectio divina et l’oraison, durent facilement un quart d’heure.

Il y a, ensuite, toutes les formes de prière, essentiellement deux : la louange et la demande.

Il nous faut retrouver la louange. Nous l’avons beaucoup oubliée ! Et là aussi il faut prendre les moyens. Le mieux est d’avoir un texte de louange. C’est à chacun de trouver, mais le Magnificat de la Vierge Marie est à disposition immédiate.

Certains, au nom de l’opportunité de la prière de louange, on tendance à dévaluer la prière de demande. Mais, non ! La prière de demande est essentielle. Nous sommes des enfants qui disent leurs besoins à leur Père !

Dans la prière de demande, il y a la demande de pardon. Elle vient bien au terme de la journée. Je remercie le Seigneur de tout ce qu’il m’a donné de bien vivre et je lui demande pardon de ce que j’ai mal vécu. Mais, ce qui occupe largement l’espace de la prière de demande, c’est l’intercession : prier pour quelqu’un.

Personnellement, je pratique beaucoup l’intercession par le Je vous salue Marie. Il m’arrive de dire un rosaire, trois chapelets, dans la journée pour une personne, que je porte tout particulièrement dans mon cœur. Mais, ce peut être beaucoup moins. Surtout cela peut être très éparpillé dans la journée.

Il faudrait développer longuement ce que je viens de dire brièvement. Mais, je parle de la prière comme base de la conversion et, dans la conversion, si la prière est essentielle, il n’y a pas que la prière, la relation à Dieu, il y a, aussi, la relation aux autres.

Ici je vais être bref. Je résume tout dans le mot « bienveillance ».

Frères et sœurs, cultivons la bienveillance. D’abord, bien sûr, en chassant la malveillance. Mais, la bienveillance n’est pas un simple herbicide qui élimine la mauvaise herbe de la malveillance. La bienveillance est éminemment positive et elle se cultive.

Il faut de l’attention et plus encore de l’application. Il faut s’appliquer à être bienveillant. Ce doit être un souci permanent et universel, en tout temps et en tout lieu, et pour toute personne. Il faut chercher le geste amical et la parole aimable, qui témoigne d’une réelle attention à l’autre. L’idée est de faire plaisir à l’autre, mieux encore lui faire du bien.

En ce carême, frères et sœurs, répondons à l’interpellation de Jésus, vivons une vraie conversion. Que notre prière soit plus intense, plus profonde et pour cela, plus longue et plus organisée, et que nos cœurs se remplissent de bienveillance pour nos frères, les hommes, tous les hommes.