Jésus n’est pas royaliste

24 novembre 2018

Je doute qu’il y ait ici quelqu’un qui ait besoin qu’on lui explique que Jésus n’est pas un roi comme les autres rois - même les enfants savent cela par coeur, a fortiori les adultes  ! Car, tout le monde a entendu ça cent cinquante fois. Jésus est né dans une crèche, il est entré dans sa capitale sur un âne, il est mort crucifié - cela prouve abondamment que la royauté de Jésus n’est pas comme les autres. Tout le monde sait cela et ce n’est pas moi qui vous le dis pour la première fois  ! C’est une affaire entendue depuis longtemps. Alors à quoi ça sert de le répéter  ? A pas grand-chose si on n’est pas capable de dire quelle est la royauté de Jésus.

Peut-on définir cette royauté de Jésus, différente des autres  ? En particulier le peut-on par la réponse de Jésus à Pilate : «  Ma royauté n’est pas de ce monde  »  ? Franchement, c’est un peu court. Qu’elle ne soit pas de ce monde ne nous dit pas grand chose sur ce qu’elle est en réalité.

En fait, ma conviction est que Jésus est agacé par cette histoire de royauté. Il lui faut, malgré tout, l’affirmer : c’est la tradition du messie, qui est fils du roi David. Mais, il faut sans cesse redéfinir le mot «  roi  » pour qu’il prenne son juste sens, il faut tordre en tout sens le mot «  roi  » pour qu’il corresponde à Jésus. Et quand Pilate, un peu excédé, finit par lui dire : «  Alors tu es roi, oui ou non  ?  » Jésus répond : «  C’est toi qui le dis  !  » Cela veut dire, manifestement, que Jésus n’a que faire du titre. En français moderne : il s’en fout  !

Ce que je dis paraîtra peut-être trop fort. Mais si on lit la suite du texte, on va voir que j’ai raison. Jésus, très détaché et très condescendant, dit à Pilate : «  C’est toi qui dis que je suis roi  ». Et, tout de suite  ! il parle d’autre chose - qui n’a strictement rien à voir avec la royauté. Il dit en effet : «  Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix.  »

Je vous propose, donc, de laisser le titre de roi, de le laisser tomber comme une vieille nippe, aussi dépassée que la monarchie absolue de Louis XIV, et de nous concentrer sur ce que Jésus dit réellement à Pilate. Tout porte à penser que, ça, en revanche, c’est important.

On notera, immédiatement, que le Fils de Dieu n’est pas venu en maître de la vérité, en auteur de la vérité et pas même en révélateur de la vérité. Il lui rend témoignage  ! Sans doute est-il l’avocat de la vérité, mais il est fondamentalement le témoin de la vérité. Il y a là quelque chose de très fort. Le témoin, c’est celui qui a vu et entendu et qui le dit sans rien ajouter et sans rien enlever : «  la vérité, toute la vérité, rien que la vérité  ». Jésus est le témoin fidèle de la vérité.

Avant de nous demander qu’est-ce qu’est cette vérité dont Jésus est le témoin, lisons la phrase qui suit et dont le sens n’est pas évident : «  Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix  ».

Ce qui est dit est qu’il y a consonance entre Jésus, témoin de la vérité, et celui qui appartient à la vérité. Ils sont, littéralement, sur la même longueur d’onde. Celui qui appartient à la vérité reconnaît Jésus comme témoin de la vérité et celui qui appartient à la vérité vient vers Jésus.

Mais - et c’est là le décisif du texte - qu’est-ce que cela veut dire «  appartenir à la vérité  »  ? Qui appartient à la vérité et qui n’appartient pas à la vérité  ?

Nous ne comprendrons pas par nous-mêmes. En fait, pour comprendre il faut relire les dernières lignes de l’entretien avec Nicodème. Jésus dit à Nicodème : «  La lumière est venue dans le monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs œuvres étaient mauvaises. Quiconque, en effet, commet le mal déteste la lumière et ne vient pas à la lumière de peur que ses œuvres ne soient démontrées coupables, mais celui qui fait la vérité vient à la lumière afin qu’il soit manifesté que ses œuvres sont faites en Dieu.  »

C’est ainsi que la phrase de Jésus à Pilate s’éclaire : celui qui appartient à la vérité, c’est celui dont les œuvres sont bonnes et Jésus vient pour que les bonnes œuvres des uns et les mauvaises œuvres des autres soient manifestes - et c’est en cela, qu’il est juge et qu’il est roi.

Frères et sœurs, celui dont les œuvres sont mauvaises s’écarte de Jésus. Il sait qu’avec Jésus ses œuvres mauvaises vont être manifestes. Mais celui dont les œuvres sont bonnes vient vers Jésus et il sera glorifié. Frères et sœurs, appliquons-nous au bien, rejetons le mal, nous irons ainsi à la lumière, nous nous détournerons des ténèbres et nous appartiendrons à la vérité, alors nous serons avec le Christ, alors nous règnerons avec le Christ  ! Amen.