Homélie ( lettre de St Paul )

30 janvier 2020

Nous avons lu en deuxième lecture, l’adresse de la Première lettre aux Corinthiens et nous allons en lire plusieurs passages importants jusqu’au premier dimanche de carême. Je me propose dans cette homélie de situer ce texte dans la carrière de Paul. La Parole de Dieu n’est pas un aérolithe qui tombe du ciel ! Il importe de situer les textes dans leur contexte.

Paul appartient à une famille juive, très observante, et qui l’a envoyé à Jérusalem faire de solides études. Jeune homme, Paul est zélé pour la loi de ses pères et la propagande chrétienne le choque profondément. Il assiste au martyre d’Etienne, le premier martyr, sans cependant participer directement à la lapidation. Cependant, un peu plus tard, muni de lettres du grand prêtre, il va à Damas pour procéder à des arrestations parmi les chrétiens. Mais, à l’entrée de la ville, il est littéralement retourné par Jésus, qui en fait, immédiatement, son apôtre. Paul va, donc, annoncer l’évangile à Damas et dans sa région. Puis, il ira à Jérusalem pour rencontrer Pierre et delà retournera à Tarse, sa ville natale.

C’est le moment où à Antioche, la grande ville de l’Orient romain, la communauté chrétienne est en pleine expansion - c’est là, à Antioche, que les chrétiens ont reçu le nom de « chrétiens ». Jusqu’ici on parlait des « nazoréens ». Barnabé, le responsable de la communauté, connaissant les capacités de Paul et son étonnante conversion, va le chercher à Tarse. Paul va donc collaborer avec Barnabé à Antioche et, un peu plus tard, au cours de ce que l’on a coutume d’appeler « le premier voyage missionnaire ».

Barnabé, qui est originaire de Chypre, entraîne Paul dans l’évangélisation de l’île, puis ils débarquent sur le continent et montent vers Antioche de Pisidie. Ils évangélisent aussi Derbé et Iconium. Après quoi ils reviennent à Antioche de Syrie, leur point de départ. Là ils racontent à l’Eglise d’Antioche leurs succès auprès des païens, qui, plus facilement que les Juifs, reçoivent le message chrétien.

Au cours de ce voyage la personnalité de Paul s’est affirmée et bientôt il va repartir en mission, Barnabé ira de son côté et Paul prendra avec lui Silas. En fait Barnabé retourne à Chypre et Paul décide de revisiter les églises fondées à Iconium et Antioche de Pisidie. A Iconium, il s’adjoint Timothée, un jeune homme plein d’ardeur. Puis, depuis Antioche de Pisidie, il va vers la Galatie, où il fonde plusieurs églises, mais dont nous ignorons les noms. Ensuite, on ne sait pourquoi, il revient vers la mer Egée et se retrouve à Troas. De là il passe en Macédoine, sur le continent européen. C’est là que commencent les grandes fondations de Paul. D’abord Philippe, une colonie romaine. Paul restera très attaché à cette communauté. Elle sera la seule communauté dont il acceptera de recevoir une aide financière. Après Philippe, par la voie Egnatia, la grande route romaine qui rejoint l’Egée à l’Adriatique, il va à Thessalonique, qui est la capitale de la province.

A Thessalonique, l’opposition des Juifs est très virulente et Paul doit quitter la ville, toujours accompagné de Silas et de Timothée. Il va à Bérée, beaucoup plus tranquille, mais les Juifs de Thessalonique le poursuivent jusque là et Paul, seul, part pour Athènes.

A Athénes Paul n’aura qu’un petit succès et, très vite, il décide d’aller à Corinthe, la capitale de la province d’Achaïe : il y a la Macédoine au nord et l’Achaïe au sud.

Corinthe est une grande ville - peut-être 300 000 habitants et a deux ports, l’un à l’est, l’autre à l’ouest. C’est une ville très commerçante et très cosmopolite. Là Paul a du succès et il restera à Corinthe un an et demi.

Au début de son séjour à Corinthe, Paul, par l’intermédiaire de Timothée, a des nouvelles de la communauté de Thessalonique. Ce sont de bonnes nouvelles ! Et, dans l’action de grâces, Paul écrit une lettre, la première lettre aux Thessaloniciens - qui est le texte le plus ancien du Nouveau Testament. A la fin de son séjour, Paul sera incarcéré avant de comparaître devant le proconsul, Gallion. C’est le contexte de sa lettre aux Philipiens, qu’il remercie pour l’aide qu’ils lui ont apportée.

Gallion n’est pas n’importe qui ! Il est le frère de Sénèque, le célèbre philosophe stoïcien et qui sera ministre de l’empereur Néron. En fait, Gallion relâche immédiatement Paul parce que les accusations portées contre lui par les Juifs concernent la Loi juive - sur laquelle Gallion n’a pas compétence.

En fait, ce moment est crucial pour Paul. Il a beaucoup de succès et cela se sait dans les différentes églises et jusqu’à Jérusalem. Mais, Paul fait des choix missionnaires bien marqués et qui sont contestés par certains. Certains, en effet, voudraient qu’on impose aux païens qui se convertissent au Christ la circoncision et la pratique de la Loi. Ce qui est tout le contraire du choix de Paul. C’est ainsi que Paul fait alors un voyage à Jérusalem pour s’expliquer auprès de Jacques, celui qu’on appelle « le frère du Seigneur » et de Pierre. Il a demandé à Barnabé de l’accompagné et il prend avec lui l’un de ses collaborateurs d’origine païenne, Tite.

A Jérusalem, il y a un accord de fond entre Pierre et Paul. Jacques lui aussi, bien que très attaché aux pratiques juives, valide les options de Paul et donc Paul repart en mission. En fait, passant par Antioche et Tarse, il revisite les églises déjà fondées et arrive enfin à Ephèse, le but de cette nouvelle mission. Ephèse est l’équivalent en Asie de Corinthe en Achaïe.

Paul va rester trois années à Ephèse et c’est le sommet de son activité. Là, bien sûr, il prêche et avec succès. Il organise, aussi, la mission dans les régions avoisinantes. Nous sommes assez bien renseignés sur ce point par la lettre aux Colossiens. Mais, un aspect majeur de son activité est la reprise de contact avec les grandes fondations en Macédoine et en Achaïe, avec Corinthe tout particulièrement. En fait, Paul va avoir de sérieuses difficultés avec les corinthiens. Certains vont contester son autorité et Paul devra y envoyer ses plus fidèles collaborateurs, Timothée et Tite.

Et bien sûr Paul écrit aux Corinthiens. Pas une ou deux lettres, mais plusieurs. On ne sait pas le nombre exact. Elles ont été rassemblées en deux compositions sous le nom de Première lettre aux Corinthiens et de Deuxième lettre aux Corinthiens.

Surtout dans la « première lettre », Paul aborde toutes sortes de questions, qui font de cette « lettre » une mine de renseignements sur les premières communautés. Nous découvrions cela dans les semaines qui viennent. Par ce rapide survol, vous avez idée du contexte dans lequel ces textes ont été écrits. Mais, je vous conseille très fort de lire dans votre Nouveau Testament la lettre en son entier avant de venir entendre des passages ici à l’église. Amen !