Homélie du Père Doumas

15 mai 2021

Homélie du dimanche 16 mai 2021.

J’avais promis une homélie sur Jésus. En fait, c’était dans le cadre du thème que j’avais développé après Pâques, le thème de l’annonce de la foi.

Un chrétien, c’est quelqu’un qui annonce la foi chrétienne. Cela fait partie de son identité. C’est inscrit dans l’ADN baptismal ! Un chrétien qui se tait est un chien qui n’aboie pas, un oiseau qui ne chante pas, une carpe. Et il vaudrait mieux pour lui être un âne qui braie ou un mouton qui bêle !

Je vous avais proposé de développer le thème de la vie spirituelle. Dire aux personnes qui expriment un désir d’écoute que l’homme est « capable de Dieu », qu’il porte en lui cette identité de fils de Dieu. Parmi les êtres de la nature, l’homme, en effet, a des capacités très originales d’intelligence et de liberté, il crée des relations très fortes d’amitié et d’amour, mais il est plus unique encore en étant le seul vivant à être capable de relation avec son Créateur. Et comment peut-on vivre en vérité en ignorant délibérément son origine ou même en la méconnaissant ? Croire, c’est, tout simplement, développer la relation avec celui qui est la source de mon existence, qui ne m’a pas jeté dans le monde, mais m’y a déposé avec amour. Oui, croire, c’est dire à Dieu : « Tu es mon Père » et c’est ce que nous faisons tous ensemble en disant « Notre Père ».

Mais, je vous avais promis une homélie sur Jésus. En fait, une sorte de vademecum pour parler de Jésus. Avec l’entrée en catéchuménat de Marion, qui n’était pas alors prévue, l’occasion est idéale. Et c’est à elle, tout particulièrement, que je vais m’adresser.

Tout le monde a entendu parler de Jésus. Et, de fait, tout le monde est né « après Jésus Christ » ! Par ailleurs, beaucoup n’en connaissent que très peu de choses. Généralement, on dit qu’il est né à Noël et qu’il est mort sur la croix. On sait aussi qu’il a prêché une religion de l’amour. Ce qui permet de souligner combien l’Eglise l’a trahi par son intolérance et sa violence.

En fait, Jésus a dit à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre ». Le sel, et pas le sucre ! Il y a une vigueur de Jésus qui écarte toute image d’un homme si doux qu’il en serait lénifiant et sans consistance réelle. Et, pour moi, Jésus est d’abord un prophète. C’est-à-dire un homme qui ne se compromet pas, qui ne tergiverse pas. Jésus ne tourne pas autour du pot, il met les pieds dans le plat ! Je prends l’exemple de la parabole que nous appelons du « bon » samaritain.

Un homme descend de Jérusalem vers Jéricho, qui est en bas, dans la plaine du Jourdain. Et il est attaqué par des bandits. Ils le laissent à moitié mort, gisant dans son sang. Passe alors un prêtre, qui va vers Jérusalem. Il voit le blessé et il continue, tout droit, son chemin. Peu après passe un lévite, un serviteur du Temple, et lui aussi il continue tout droit. Le blessé est toujours là. A t-il la force d’appeler au secours ? L’évangile ne le dit pas. Cependant arrive un samaritain, c’est-à-dire un de ces frères, demi-frères plutôt, que les Juifs haïssent parce qu’ils ont construit un Temple sur leur montagne à eux, en Samarie. Forcément un Temple rival de celui de Jérusalem !

Le samaritain voit le blessé, comme le prêtre et le lévite, mais, lui, il s’approche et s’occupe de lui. Il lui donne les premiers soins, puis il le met sur sa monture et le conduit à l’auberge, la première qu’il trouve sur la route, et il recommande le blessé à l’aubergiste en promettant qu’il repassera et paiera les frais du séjour.

Entre le prêtre et le lévite d’une part et le samaritain d’autre part, le contraste est violent. Mais, il n’oppose pas simplement un homme sensible à deux cœurs durs. Car, si le prêtre et le lévite se détournent du blessé ce n’est pas seulement parce qu’ils sont sans compassion ou pressés, mais c’est précisément parce qu’ils sont prêtre et lévite. S’ils touchent le sang du blessé, ils ne pourront pas accomplir le service dans le Temple de Jérusalem. Du coup l’identité du samaritain prend tout son relief. Et l’on voit bien ce que Jésus dénonce : pas seulement une dureté de cœur, mais une religion, un culte soi-disant adressé à Dieu, et qui exclut la solidarité humaine, la fraternité.

Avec de telles paraboles, Jésus ne s’est pas fait que des amis et cela le conduira à la mort. On prendra un prétexte politique pour le dénoncer au procurateur romain, mais le fond de l’affaire est religieux.

Je ne peux pas entrer dans le détail. Mais, tous savent que Jésus a été condamné à la crucifixion. De fait, il a fait de sa mort un acte de salut. En sorte que lorsque les chrétiens regardent une croix ils se savent sauvés. Et cette mort n’a pas été une impasse, un non-retour. Jésus, trois jours après sa mort, est ressuscité. Il s’est montré vivant à ses disciples. Qui ont annoncé sa résurrection !

Bien sûr il faudrait argumenter sur ce point. Mais nous n’avons plus le temps. J’insiste seulement sur le point capital : Jésus n’est pas seulement un homme exceptionnel. Car, dans l’histoire de l’humanité, il y a eu un grand nombre d’hommes exceptionnels, que chacun, selon son choix, admire. Jésus est véritablement unique. Absolument unique.

Qui mettrait en parallèle Jésus et Mahomet ? Ou même Jésus et Bouddha ? Il y a chez Jésus une telle personnalité, des traits si spécifiques ! Et, en fait, les chrétiens se sont posés la question de son identité : « Mais qui est-il donc ? » Et s’est imposée la réponse : « Il est le Fils de Dieu, qui s’est fait homme, pour que nous vivions de la vie même de Dieu ».

Ce point-là est si important que je le reprendrai dimanche prochain. Car, oui, ce que Jésus révèle c’est cela : notre vocation à vivre par Dieu, de Dieu, en Dieu. L’homme est un être spirituel, capable de Dieu, c’est-à-dire capable de vivre de la vie même de Dieu. C’est ce que Jésus a révélé ! Amen.