Homélie

24 mai 2019

Homélie du samedi 18 mai 2019

« Maintenant le Fils de l’homme est glorifié et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera et il le glorifiera bientôt. » La parole est mystérieuse. Il convient d’utiliser les clefs de l’exégèse.

On repère, aisément, dans l’évangile de Jean, deux grandes parties, le livre des signes et le livre de la gloire. Le livre des signes commence avec les noces de Cana au tout début de l’évangile. Le récit se conclut ainsi : « Tel fut à Cana de Galilée, le commencement des signes de Jésus ». Et ce livre des signes est clairement clôturé en 12, 37 : « Quoiqu’il eut opéré devant eux tant de signes, ils ne croyaient pas en lui. » Le livre de la gloire commence alors avec les phrases fameuses : « Avant la fête de la Pâque, Jésus sachant que son heure était venue, l’heure de passer de ce monde au Père, lui qui avait aimé les siens qui sont dans le monde, les aima jusqu’à l’extrême. »

La « gloire » de Jésus, c’est donc son passage au Père, qui inclut sa Passion et sa Résurrection. Et l’on comprend aisément que par sa Passion Jésus glorifie le Père et que par la Résurrection le Père glorifie Jésus.

Le texte que nous avons lu est une annonce et de l’une et de l’autre : « Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera et il le glorifiera bientôt. » Ce que Jésus confirme en termes plus ordinaires quand il ajoute : « C’est pour peu de temps encore que je suis avec vous. »

C’est dans ce contexte que Jésus donne le commandement nouveau : « Petits enfants, je vous donne un commandement nouveau ; c’est de vous aimer les uns les autres. » Et c’est très précis : « Comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. » Tout est dans le « comme je vous ai aimés » ! Il faut bien comprendre cela. Il ne s’agit pas d’une simple imitation. Il s’agit, littéralement, d’inspiration. Cela veut dire : c’est moi qui vous communique l’amour dont vous aimerez. C’est pourquoi l’amour est don de l’Esprit Saint. Cependant, dans ce passage, Jésus insiste sur le fait que l’amour des disciples entre eux, s’il est véritable, sera manifeste : « A ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. »

Cela veut dire, frères et sœurs, que ce texte nous invite à la réflexion théologique - c’est le thème de la gloire, mais plus encore à l’interrogation pratique : est-ce que nous nous aimons en sorte que tous reconnaissent en nous des disciples de Jésus ?

Je crois qu’ici, quand nous sommes rassemblés dans l’église, il y a une réelle ambiance fraternelle. Je crois que les gens qui viennent de l’extérieur le sentent. Bien sûr ce n’est pas parfait. Et les trombines ne sont pas toutes à la joie, rayonnantes de la Résurrection de Jésus ! Mais, tout de même, il y a bien quelque chose, qui vient de Jésus et qui se répand entre nous.

Il est très important que nous progressions dans ce domaine. Je rêve que nous nous connaissions tous, que chacun connaisse chacun. On repère les têtes, mais les noms ? On sait des noms, mais les situations ? Mais comment puis-je appeler « frère » ou « sœur » une personne dont j’ignore tout de lui ou d’elle ?

En ces matières, il ne faut pas seulement se contenter des choses qui viennent, des hasards du moment. Il faut être volontariste. Il faut prendre la décision et parler, entreprendre l’échange. Ce ne sera pas une conversation métaphysique ou hautement spirituelle, mais quelque chose de concret. Et pour le coup on peut faire confiance à l’inspiration du moment. Mais, j’insiste : il y a, d’abord, la décision et puis l’inspiration !

Très souvent, dans nos célébrations, j’utilise le prénom des uns et des autres, des enfants d’une manière privilégiée, mais aussi des adultes. Le moment des lectures ou de la prière universelle est très favorable. Mais il y a aussi les annonces. Ce n’est pas seulement de l’information, c’est aussi l’expression d’une tendresse et j’aime y ajouter de l’humour.

Nos relations humaines sont, en vérité, très hiérarchisées. Il y a nos proches et nos très proches. Il y a la famille et les amis. Et parmi ceux-là nos relations sont très variées. Personnellement, je cultive l’amitié. C’est mon jardin ! Et dans ce jardin il y a des fleurs très aimées ! Je ne peux pas aimer tout le monde de cette manière-là. Mais, je suis appelé à avoir avec tous : avec tous ceux et celles que je rencontre une bienveillance amicale : un sourire, un geste, un mot, quelque chose qui signifie que nous sommes frères et soeurs en Jésus.

Au départ de la célébration, nous sommes des dispersés, qui parce qu’ils sont invités par le Seigneur, deviennent des rassemblés ! C’est exactement le sens du mot « église ». Mais, à la fin de la célébration, nous avons communié au même Corps, nous avons bu au même Sang et nous avons prié en disant : « Humblement nous te demandons qu’en ayant part au corps et au sang du Christ, nous soyons rassemblés par l’Esprit Saint en un seul corps. » Nous sommes devenus un seul corps ! Soyons, donc, des membres articulés les uns aux autres, que nul n’ignore son frère ou sa sœur, surmontons nos réflexes d’indifférence, vivons la bienveillance fraternelle. Amen !